Il n'y avait que Sergei pour trouver ça non seulement naturel mais indispensable et qui s'étonnait même qu'on n'eût pas commencé par ça, qu'on n'eût pas, pour la première mission de la navette, lancé un Prix Nobel de littérature dans l'espace, le pape ou le dalaï-lama, un artiste d'avant-garde ou un philosophe. Il jugeait même - sacrilège suprême qu'il n'énonçait qu'à mi-voix- qu'il y aurait eu de bien meilleurs candidats que Gagarine pour la première mission humainement habitée. Tu imagines, m'avait-il fait remarquer, si pendant cette mission, Gagarine était tombé nez à nez sur un être intelligent et néanmoins extraterrestre? L'humanité aurait été bien emmerdée et on a couru un gros risque, parce que le commandant Gagarine, malgré ses extraordinaires mérites, n'était tout de même pas une lumière...
Le commandant Pointdexter quitte la Terre pour une mission spatiale, accompagné d'un mexicain, d'un russe, d'une femme et d'un écrivain. Oui, vous allez me dire, étrange répartition qui classe les personnes dans des catégories qui ne s'excluent pas les unes des autres. Mais je peux le faire parce que cela convient parfaitement à l'esprit de ce roman. Si je vous dis que l'écrivain a des problèmes avec son frère, lui aussi écrivain, que le russe est amoureux fou d'une femme qui le fait tourner en bourrique, que notre Latino tombe amoureux de sa collègue qui ressemble à un tableau de musée et qu'à un moment apparaît Jésus, vous aurez déjà une vague idée du joyeux bazar contenu dans ce roman.
J'avais lu le recueil de nouvelles de Vincent Delecroix, Une chaussure sur un toit, publié en 2007. Comme vous le savez, les nouvelles et moi, ça fait deux, et pourtant, il avait su m'emporter en gardant cette chaussure comme fil conducteur. Mais depuis, il n'avait rien écrit, ce qui explique peut-être qu'il ait eu besoin d'écrire plus de 600 pages cette fois-ci. Si vous aimez les livres déjantés, ce roman est pour vous. L'auteur parvient même à parler de son précédent titre en faisant passer son narrateur juif pour un écrivain ayant choisi un pseudo goy. Certains passages m'ont agacée mais le génie de Delecroix, c'est qu'ils sont faits pour agacer puisque c'est Chaïm, le narrateur, qui tient à jouer son rôle de raconteur d'histoires et nous transmet l'histoire de son aïeul, dont tout le monde se moque. Il y a par contre des moments de grâce loufoque et/ou lyrique comme la scène du musée (l'amour d'Antonio pour Beth nous embarque) ou celui sur la critique littéraire de la Bible. Marc Lévy est régulièrement écorché au passage. Bref, Vincent Delecroix, malgré sa tête de premier de la classe, est complètement fou et j'ai globalement aimé ça.
Publié chez Gallimard le 24 août 2017- 640 pages
Merci à la Librairie Dialogues.
A conseiller à ceux qui acceptent un peu plus qu'un soupçon de folie.
Merci à la Librairie Dialogues.
A conseiller à ceux qui acceptent un peu plus qu'un soupçon de folie.
Un brin de folie n'est pas fait pour me faire peur ; donc, je retiens.
RépondreSupprimerJe n'ai vu aucune aucune autre chronique, je suis donc curieuse d'avoir ton avis.
SupprimerQuoi, rien écrit depuis La chaussure sur le toit? Alors si ce roman est un brin décalé, je fonce (déjà noté, d'ailleurs)
RépondreSupprimerSi mais je pense que ce n'est pas de la fiction.
SupprimerJe suis en train de le lire (genre page 400 et quelques, les dialogues filent plus vite) et parfois c'est la franche rigolade, parfois c'est vraiment un conte. Allez, restent 200 pages, faut rien me révéler! Je devrai aussi me renseigner sur l'auteur, très érudit.
SupprimerIl me semble bien trop fantaisiste pour moi, surtout sur la longueur, même si ton billet m'a fait sourire.
RépondreSupprimerC'est toujours ça de gagné!
SupprimerOh là là, ce n'est pas pour moi ce genre de livre, c'est certain. En plus, 600 pages....
RépondreSupprimerJe comprends!
SupprimerJ'en suis à 3 pavé de plus de 600 pages depuis le début de l'été, c'est déjà un score exceptionnel et ce roman déjanté ne viendra pas s'ajouter à la liste malgré ton avis favorable ;)
RépondreSupprimerJ'avais remarqué que tu y étais allé fort côté pavé cet été!
SupprimerJe vois que Keisha est déjà passée par là ! Quand je lis "lecture déjantée", je pense à elle !
RépondreSupprimerVal, je venais voir ton billet sur Dugain, mais je crois que tu ne l'as pas fait. J'attendrai...
Ah si, le voilà:
Supprimerhttp://parenthesedecaractere.blogspot.fr/2017/08/ils-vont-tuer-robert-kennedy-de-marc.html
Il a l'air un peu bizarre, mais je le lirai peut-être, j'amais vraiment eu un coup de coeur pour La chaussure sur le toit.
RépondreSupprimerLa chaussure sur le toit était plus "normal". C'était vraiment une réussite.
SupprimerGlobalement aimé, mais pas totalement convaincu ?
RépondreSupprimerConvaincue si mais pas totalement enthousiaste.
SupprimerPas sûre que ça me convienne, mais je testerai à l'occasion, si je le trouve en bibli.
RépondreSupprimerOn le voit peu (voire pas) sur les blogs.
SupprimerIl me tente bien. J'avais adoré sa chaussure sur le toit...
RépondreSupprimerMoi aussi.
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