vendredi 21 juillet 2017

[parenthèse] Claude Lelouch (ou plutôt ses films) et moi

J'ai eu envie de prendre un raccourci et je me suis paumé...

Si je vous disais que j'ai vu tous les films de Claude Lelouch, moi qui ne suis cinéphile que par intermittence, je serais une fieffée menteuse. Comme la plupart d'entre vous, je suppose, j'ai vu quelques uns de ces films, en ai aimé mais ai aussi été de plus en plus agacée par ce que je considérais comme un scénario inconsistant (précisons tout de suite, mais vous le savez déjà, que je ne suis pas une spécialiste du cinéma, encore moins du cinéma français et que tout ce qui suivra sera du pur ressenti et en aucun cas une analyse). Je crois que pour moi, tout tient dans le choix des acteurs, c'est grâce à eux si j'accroche ou pas au film. Trintignant et Anouk Aimé sont superbes dans Un homme et une femme et Montand et surtout Annie Girardot, une actrice que j'aime beaucoup, le sont tout autant dans Vivre pour vivre. Je me rends compte que j'ai vu ses films par vagues, pas mal de films des années soixante (je rappelle aux médisants que je n'étais pas née), aucun des années 70. Puis entre 1980 et Hommes, Femmes, mode d'emploi, j'en ai vu un sur deux et là encore, mon choix fut souvent guidé par l'affiche. Après ça, j'ai décidé que décidément, l'improvisation pouvait être géniale dans des moments de grâce (cf la scène de Lucchini dans la tente dans Tout ça pour ça) mais que j'aimais les scénarios et les dialogues plus écrits. 
Je n'avais pas vu Itinéraire d'un enfant gâté. Et disons-le, entre ce film et moi, ça commençait mal puisque mon premier téléchargement légal (sur Vidéofutur) ne me permit pas de le visionner. Je payai donc une deuxième fois. Autant dire qu'il avait intérêt à valoir le coup! Et ce fut le cas. Sam Lion, enfant abandonné, est élevé dans le milieu du cirque qui restera sa passion. A la suite d'un accident de trapèze, il se reconvertit dans le nettoyage. Sa société prospère mais un beau jour, il décide de tout quitter, son entreprise et ses enfants devenus adultes, de se faire passer pour mort et de vivre en Afrique. 
Je ne sais pas si j'ai aimé ce film mais il m'a bouleversée, trop peut-être pour que j'aie pu éprouver du plaisir à le regarder dans la première partie en tout cas. Je ne sais pas non plus si on peut y être sensible en nageant dans le bonheur. Parce que c'est sans doute le film le plus réussi qu'il m'ait été donné de voir sur la dépression (là encore, c'est mon ressenti, je ne sais pas ce que Lelouch a voulu faire de ce film). Jean-Paul Belmondo qui obtint le César du meilleur acteur pour ce rôle est un être qui a perdu sa femme pendant leur nuit de noce et on sent qu'une chape de plomb lui pèse sur les épaules. Inutile pour lui de parler, tout se lit sur son visage et j'avoue que je ne connaissais pas la facette dramatique de cet acteur, mes parents ne m'ayant fait connaître que ses films comiques (ceux où il est toujours accompagné d'une actrice sculpturale, ce qui fait que je l'ai longtemps considéré comme un James Bond comique français) même si ado, j'avais bien sûr découvert A bout de souffle. Il était temps que je le découvre autrement. J'ai eu grand plaisir à revoir Richard Anconina jeune,  qui savait alors à la fois me toucher et me faire rire et j'avais oublié que Marie-Sophie L (la compagne de Claude Lelouch que je préfère, je ne compte pas Annie Girardot puisque je viens de découvrir leur relation en rédigeant ce billet) était si jeune quand elle a commencé à jouer pour Lelouch. C'est donc un film qu'il faut absolument voir, peut-être en période creuse, avec des mouchoirs sous la main. Je vous conseille aussi de le voir seul (ironie du sort, je rêvais de voir ce film accompagnée), sauf si vous souhaitez vous faire consoler (après tout, c'est une tactique comme une autre). Personnellement, le nez rouge et les yeux bouffis par les larmes, je préfère les garder pour moi. Je me suis interrogée sur la corrélation entre le moment où mes larmes ont commencé à couler à flots et les scènes avec les animaux sauvages, parce qu'il y a, dans Le ciel attendra qui tente d'analyser comment fonctionne l'embrigadement des jeunes femmes, une scène importante liée à ces vidéos. mais je n'ai pas trouvé de réponse. La deuxième moitié est plus reposante avec des passages drôles et tendres (la demande en mariage par exemple). Comme tous les films réussis, ce film pose la question du sens (pourquoi Sam décide-t'il réellement de tout quitter?) et même des questions morales (peut-on décider de disparaître en sachant qu'on laisse de la souffrance derrière soi? Est-on vraiment à même de juger que l'un de nos enfants a besoin qu'on s'éloigne pour qu'il s'épanouisse?) qu'on aurait envie de creuser à plusieurs. Le dernier passage est d'une beauté à pleurer (donc, oui, les larmes reviennent à la fin). Je ne savais ni que Lelouch pouvait à ce point émouvoir, ni que Belmondo pouvait exprimer le mal de vivre avec une telle intensité. 

A conseiller à ceux qui ont déjà eu l'impression de toucher le fond, ce film ne peut que leur parler. A conseiller aussi aux adeptes de John Irving, il y a des traits communs dans leur univers (le cirque, la manière de traiter le lien parents/ enfants et bien sûr, un certain désespoir). 
Merci Romain.



18 commentaires:

  1. Je suis très sensible à ton partage, Valérie, car j'ai vu ce film il y a quelques années et il m'avait beaucoup touchée ... Ton billet m'a donné envie de le revoir.

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  2. Belmondo est également formidable dans "Le professionnel".
    Mon mari adore cet acteur... Je l'aime beaucoup également !

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  3. Pour moi, qui ne suit plus cinéphile et n'ai jamais été un spécialiste non plus, c'est au mieux du cinéma expérimental Lelouch. J'ai vu quelques films, pas beaucoup et j'ai arrêté d'en voir ce ce réalisateur.

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  4. Très beau billet, je ne connais pas du tout ce film, erreur à réparer donc ...

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  5. Lelouch... il y aurait tant à dire sur ce cinéaste capable du meilleur comme du pire en effet.

    Je me demande s'il n'y pas chez lui une certaine forme de génie, un peu comme Godard. Ces hommes-là ont des coups de génie phénoménaux, inoubliables. Mais, entre les deux... ils cherchent et ce qu'il font est totalement destructuré, anarchique et... chiant il faut bien le dire. :) Ils nous font profiter de leurs idées jetées sur l'écran avant même de les avoir organisées, on s'en passerait.

    Mais, quand le coup de génie revient, c'est magistral.

    Je n'ai pas vu le film dont tu parles, mais sur le même modèle, j'ai vu et adoré un autre chef-d'oeuvre de Berri : TCHAO PANTIN.

    *Anconina jeune encore et excellent.
    *Pas de Belmondo, mais un Coluche d'une intensité remarquable dans un rôle des plus sérieux.
    *Une réflexion sur la vie et sa cruauté vraiment sensible et profonde.

    Du grand art !

    Pour revenir à ce titre-ci, je vais attendre une période favorable pour le regarder, car il semblerait que l'on n'en sorte pas indemne, or... je suis un peu fragile. ;-)

    Passe une belle fin de semaine.

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    1. Je préfère visiblement Belmondo à Coluche (je ne parle pas de l'oeuvre de l'homme, qui est évidemment admirable mais de l'acteur). Je ne nie pas les qualités de Tchao Pantin mais le seul acteur qui me touche dedans est effectivement Anconina (Agnès Soral m'est assez insupportable) et je pense qu'il est vraiment trop noir pour moi. Je crois que j'ai toujours beaucoup de mal avec les personnages de losers (et quand je dis loser, ce n'est pas un jugement de valeur, c'est un type de personnage que l'on retrouve fréquemment dans les films et au cinéma). Alors que pour moi, Belmondo dans Itinéraire d'un enfant gâté n'en est pas un du tout.

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    2. Saperlipopette, il faut vraiment que je vois ce film ! Ne serait-ce que pour pouvoir en parler avec toi ! :) Il semble vraiment unique en son genre. Dès que je me sens assez forte, je fonce !

      J'ai parcouru les autres commentaires et je dois avouer que... ce titre est, en effet, l'un des films préférés de mon copain qui est... cinéphile et cinéaste !!! :)

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    3. C'est assez étonnant. Moi j'ai été touché par le désespoir qui se dégage du personnage de Belmondo, c'est de la pure émotion. Je serais curieuse de savoir ce qu'apprécient particulièrement les hommes cinéphiles.

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    4. Alors, alors, voici les (brèves!) réponses de mon homme :

      *vu il y a hyper longtemps, mais souvenir intense des comédiens (plus que du scénario en tant que tel et de la mise en scène);

      *LA scène devenue « culte » pour lui : celle où Belmondo apprend à Anconina à ne pas être étonné.

      * Questionnement sur le fait qu'il avait 20 ans à l'époque et qu'il avait « malgré tout » beaucoup aimé. S'il le voyait aujourd'hui à 50 ans pour la première fois ?

      Réponse (partielle et un peu faussée, mais tout de même) quand il va le re-regarder avec moi :)

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    5. Merci à ton homme de nous livrer son regard.
      Oui cette scène est culte, il faut dire que là, Lelouch a parfaitement saisi Anconina, il a probablement écrit cette scène pour lui.

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  6. Bonjour Valérie, moi je suis moins fan que toi. Sinon, c'est mon copain ta d loi du cine qui m'a fait découvrir Itinéraire d'un enfant gâté dont il est fan. Je pense que c'est son préféré. Bonne journée.

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    1. Je ne suis pas fan de Lelouch mais j'y reviens fréquemment. En faisant quelques recherches sur le film, je me suis rendue qu'un certain nombre de cinéphiles (plutôt des hommes) font de ce film l'un de leurs films cultes.

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  7. Pas envie de toucher le fond (cet hiver a particulièrement été rude pour le moral). J'ai un sentiment partagé sur l’œuvre de Lelouch et je suis en général très indulgente vis à vis de ce réalisateur parce qu'il ose (et c'est ce que j'aime et j'attends dans l'art en général.. des gens qui sortent des sentiers battus)

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    1. L'avantage d'être au fond, c'est que tu peux donner un gros coup de pied et essayer de remonter. Mais effectivement, après, on ne prend plus le risque de se retrouver au fond à nouveau (je ne savais pas que ce film allait autant me faire pleurer, je pensais même y rester insensible).

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